Siège de Gaza: MSF dénonce une catastrophe humanitaire délibérée
14 mai 2025 – La proposition conjointe des autorités américaines et israéliennes visant à encadrer la distribution de vivres sous prétexte d’aide humanitaire suscite de vives inquiétudes sur les plans humanitaire, éthique, sécuritaire et juridique, alerte l'organisation médicale internationale Médecins Sans Frontières (MSF). Subordonner l’aide à des déplacements forcés et au contrôle de la population constitue un instrument supplémentaire dans une campagne de nettoyage ethnique actuellement à l’œuvre contre les Palestiniens. MSF rejette catégoriquement tout plan qui entrave davantage l’accès à l’aide humanitaire et l’assujettit aux objectifs de l’occupation militaire israélienne.
.JPG "Des palestiniens déplacés reviennent à Khan Younis depuis Rafah. 6 mai 2024. © MSF")
Nous assistons, en temps réel, à la mise en place de conditions visant à l’éradication de la population palestinienne à Gaza.
L’obstruction à l’aide humanitaire constitue une violation directe de la résolution 2720 du Conseil de sécurité des Nations unies, qui appelle à une livraison sans entrave de l’aide humanitaire aux civils. Les allégations de détournement de l’aide par le Hamas n’ont à ce jour aucune preuve vérifiable et ne justifient en aucun cas la mise en place de telles mesures. En tant que puissance occupante, Israël a l’obligation de garantir l'acheminement d’une aide humanitaire impartiale à la population dans le besoin.
L’ONU, les États membres de l’Union européenne et tous les acteurs ayant une influence sur Israël doivent, de toute urgence, utiliser leur pouvoir politique et économique pour mettre fin à l’instrumentalisation de l’aide. Matériel humanitaire, nourriture, carburant et médicaments, doivent parvenir sans délai à la population de Gaza.
Depuis la reprise des attaques israéliennes et l’imposition d’un blocus total de l’aide humanitaire le 2 mars, Gaza est devenue un véritable enfer sur terre pour les Palestiniens. Leur survie dépend désormais entièrement des autorités israéliennes, qui privent la population de tout accès à la nourriture, à l’eau, aux soins médicaux et à un abri. Israël poursuit sa campagne de nettoyage ethnique en détruisant délibérément les conditions nécessaires à la vie.
Des organisations telles que World Central Kitchen et le Programme alimentaire mondial (PAM) ont signalé qu'elles ne disposaient plus de réserves alimentaires à Gaza : la majorité des cuisines communautaires et des boulangeries ont été contraintes de fermer. Les équipes médicales de MSF sur place constatent une augmentation alarmante de 32 % des cas de malnutrition au cours des deux dernières semaines.
La diminution des stocks de carburant limite gravement la capacité de dessalement et de distribution de l'eau. Les établissements de santé encore opérationnels - déjà insuffisants en nombre et en capacité pour répondre aux besoins de la population - continuent d’être attaqués et souffrent d’une souffrent d’une diminution rapide de leurs stocks de médicaments et de fournitures essentielles. Les équipes de MSF à Gaza n'ont pas reçu de ravitaillement depuis 11 semaines et se retrouvent confrontées à une pénurie critique de matériel médical vital, comme des compresses stériles et des gants stériles.
Les ordres d’évacuation et les zones militaires interdites imposés par Israël couvrent désormais 70 % du territoire de Gaza. La population est déplacée de force d’un endroit à l’autre, tandis qu’aucune zone n’échappe aux attaques. La situation est si désespérée que les équipes de MSF ont dû soigner des patients et les renvoyer, pour qu’ils reviennent ensuite avec de nouvelles blessures.
Le projet israélien d’instrumentaliser l’aide humanitaire constitue une réponse cynique à la crise humanitaire qu’ils ont eux-mêmes engendrée. Si Israël et ses alliés le désiraient, ils pourraient lever le blocus dès aujourd’hui et permettre à l’aide humanitaire d’atteindre tous ceux qui, à Gaza, en dépendent pour survivre.
Quentin Barrea