Selon MSF, il est grand temps que la Belgique prenne position sur les monopoles pharmaceutiques pendant la pandémie
Depuis quelques mois, une proposition est sur la table européenne pour suspendre temporairement les brevets sur les produits médicaux contre le COVID-19 dans le monde entier pendant cette pandémie. Cela permettrait de garantir que les tests, matériaux de protection et éventuellement les vaccins puissent être produits en masse dans le monde entier. La Belgique peut jouer un rôle de pionnier dans ce débat et contribuer ainsi à endiguer plus rapidement la pandémie, mais la position de notre pays n'est toujours pas claire. Les pays se réuniront à nouveau ce 4 février.
"Actuellement, les brevets limitent la production et la fourniture mondiales de dispositifs médicaux COVID-19. Une exemption temporaire de propriété intellectuelle sur ces brevets permettrait aux pays de ne pas appliquer ou mettre en œuvre ces droits exclusifs et d'autres droits jusqu'à ce que l'immunité de groupe mondiale soit obtenue. Ainsi, les fabricants potentiels seraient en mesure de produire les dispositifs médicaux nécessaires contre le COVID-19, sans craindre d'être bloqués par des brevets ou d'autres monopoles", déclare Dimitri Eynikel, conseiller en politique européenne de MSF. "C'est pourquoi MSF demande au gouvernement belge de soutenir clairement et publiquement la proposition. Actuellement, l'Union européenne (UE) bloque la proposition à l'Organisation mondiale du commerce (OMC). Nous demandons donc à la Belgique d'envoyer un signal fort à l'UE qui pense qu'elle protège ses intérêts commerciaux, mais en fait qui ne lutte pas de manière adéquate contre la pandémie avec tous les moyens possibles. Il est temps de mettre toutes les ressources, comme les vaccins, à la disposition de tous et d’aider à mettre fin à la pandémie le plus rapidement possible".
La proposition de suspendre temporairement les brevets sur les vaccins, entre autres, a été proposée par l'Afrique du Sud et l'Inde à l'OMC le 2 octobre, et est maintenant officiellement coparrainée par Eswatini, le Kenya, le Mozambique, le Pakistan, la Mongolie, le Venezuela, la Bolivie et l'Égypte. Toutefois, un petit groupe de membres de l'OMC, dont l'UE, le Royaume-Uni, les États-Unis, le Japon, la Suisse et l'Australie, continuent de s'y opposer.
"Cette proposition garantirait qu'un pays puisse décider individuellement si le brevet est valable. En cas de pénurie, un gouvernement pourrait alors agir rapidement et commander des masques buccaux, des ventilateurs ou des tests aux pays qui peuvent en produire. Nous demandons donc de soutenir la proposition. Mais jusqu'à présent, la position de la Belgique n'est pas claire", poursuit Dimitri Eynikel.
Pourquoi cette proposition ?
La nécessité de cette exemption de brevet devient de plus en plus urgente, d'autant plus que des variantes du COVID-19 apparaissent et que le nombre d'infections continue d'augmenter. Sans un accès universel, abordable et équitable aux ressources médicales, la pandémie durera plus longtemps. Cela n'affectera pas seulement les personnes atteintes du COVID-19, mais aussi la capacité des systèmes de santé à assurer la vaccination, les soins et le traitement d'autres maladies. La suspension temporaire des brevets place les vies humaines au-dessus des profits privés.
La nécessité d'un accès mondial, le droit de produire et de fournir des technologies de santé liées au COVID-19 sont largement reconnus. Malgré les efforts et les déclarations de divers chefs d'État visant à traiter les produits médicaux COVID-19 comme des "biens publics mondiaux", peu de choses ont été, jusqu’à présent, réalisées à cet égard. Les entreprises pharmaceutiques continuent à opérer en toute impunité, avec, par exemple, des accords bilatéraux secrets de licence commerciale et d'achat qui compromettent l'accès des populations vulnérables et négligées dans de nombreux pays en voie de développement.