Gaza, un piège mortel: un rapport MSF dénonce la campagne de destruction totale menée par Israël ​

Israël détruit les conditions de vie à Gaza avec attaques incessantes, siège et blocus.

PARIS/BRUXELLES/BARCELONE/JERUSALEM, 19 décembre 2024 - Les attaques militaires israéliennes répétées contre les civils palestiniens au cours des 14 derniers mois, le démantèlement du système de santé et d'autres infrastructures essentielles, l’étouffant siège et le refus systématique d’assistance humanitaire, détruisent les conditions de vie à Gaza, selon un nouveau rapport de Médecins Sans Frontières (MSF) intitulé « Gaza : La vie dans un piège mortel ». L'organisation médicale humanitaire internationale lance une fois de plus à toutes les parties, un appel urgent à un cessez-le-feu immédiat afin de sauver des vies et permettre l'acheminement de l'aide humanitaire. Israël doit cesser ses attaques ciblées et indiscriminées contre les civils, et ses alliés doivent agir sans délai pour protéger la vie des Palestiniens et faire respecter les règles de la guerre. ​ 

Lire notre rapport en fin de communiqué

Possibilité d'interview avec Brice de le Vingne, responsable de l'unité d'urgence MSF, de retour de Gaza.

« Les habitants de Gaza luttent pour survivre dans des conditions apocalyptiques, mais aucun endroit n'est sûr, personne n'est épargné et il n'y a pas d'issue de cette enclave dévastée », a déclaré Christopher Lockyear, secrétaire général de MSF, qui s'est rendu à Gaza au début de l'année. ​ 

« La récente offensive militaire dans le nord est l’illustration saisissante de la guerre brutale que les forces israéliennes mènent contre Gaza, et nous voyons des signes évidents de nettoyage ethnique alors que les Palestiniens sont déplacés de force, pris au piège et bombardés », a déclaré Christopher Lockyear. « Ce que nos équipes médicales ont observé sur le terrain tout au long de ce conflit correspond aux descriptions fournies par un nombre croissant d'experts juridiques et d'organisations qui concluent qu'un génocide est en cours à Gaza. Bien que nous n'ayons pas l'autorité légale pour établir l'intentionnalité, les signes de nettoyage ethnique et la dévastation en cours - y compris les massacres, les sévères blessures physiques et mentales, les déplacements forcés et les conditions de vie impossibles pour les Palestiniens assiégés et bombardés - sont indéniables. » 

En réponse aux horribles attaques menées par le Hamas et d'autres groupes armés en Israël le 7 octobre 2023 - qui ont fait 1 200 morts et pris 251 personnes en otage - les forces israéliennes écrasent la population entière de Gaza. La guerre totale d'Israël contre Gaza aurait tué plus de 45 000 personnes, selon le ministère de la Santé, dont huit collègues de MSF. Le nombre de décès liés à la guerre est probablement beaucoup plus élevé en raison de l'effondrement du système de santé, des épidémies et de l'accès très limité à la nourriture, à l'eau et aux abris. Les Nations unies ont estimé au début de l'année que plus de 10 000 corps restaient enfouis sous les décombres. Les forces israéliennes ont à de nombreuses reprises empêché l'entrée dans la bande de Gaza de produits de première nécessité tels que la nourriture, l'eau et les fournitures médicales, tout en bloquant, refusant et retardant l'aide humanitaire, comme l'indique le rapport. Quelque 1,9 million de personnes - 90 % de la population totale de la bande de Gaza - ont été déplacées de force, et nombre d'entre elles ont été contraintes de se déplacer plusieurs fois. ​ 

Moins de la moitié des 36 hôpitaux de Gaza sont, ne serait-ce que partiellement, fonctionnels et le système de santé est en ruine. Au cours de la période d'un an couverte par le rapport - d'octobre 2023 à octobre 2024 - le personnel de MSF a subi à lui seul 41 attaques et incidents violents, notamment des frappes aériennes, des bombardements et des incursions violentes dans les établissements de santé ; des tirs directs sur les abris et les convois de l'organisation ; et la détention arbitraire de collègues par les forces israéliennes. Le personnel médical et les patients de MSF ont été contraints d'évacuer des hôpitaux et des infrastructures médicales à 17 reprises, souvent en courant, littéralement, pour sauver leur vie. Les parties en conflit se sont livrés à des combats près des infrastructures médicales, mettant en danger les patients, les soignants et le personnel médical. ​ 

Parallèlement, les blessures physiques et mentales des Palestiniens sont accablantes et les besoins ne cessent d'augmenter. Les structures soutenues par MSF ont effectué au moins 27 500 consultations pour violence et 7 500 interventions chirurgicales. Les gens souffrent de blessures de guerre et de maladies chroniques, qui s'aggravent lorsqu'ils n'ont pas accès aux services de soins de santé et aux médicaments essentiels. Les déplacements forcés par Israël ont contraint les populations à vivre dans des conditions insupportables et insalubres, propices à la propagation rapide des maladies. En conséquence, les équipes de MSF traitent un grand nombre de personnes pour des maladies telles que des affections cutanées, des infections respiratoires et des diarrhées, maladies qui devraient augmenter à mesure que les températures hivernales chutent. Les enfants ne sont pas vaccinés, les rendant vulnérables à certaines maladies comme la rougeole et la polio. MSF a observé une augmentation du nombre de cas de malnutrition, cependant il est impossible de réaliser un dépistage complet de la malnutrition à Gaza en raison de l'insécurité généralisée et du manque de mesures appropriées de déconfliction. 

Alors que les possibilités de soins médicaux se raréfient à Gaza, Israël a rendu encore plus difficile l'évacuation médicale des personnes. Entre la fermeture du point de passage de Rafah début mai 2024 et septembre 2024, les autorités israéliennes n'ont autorisé l'évacuation que de 229 patients, soit 1,6 % de ceux qui en avaient besoin à ce moment-là. Cela représente une goutte d'eau face à l'ampleur des besoins. 

La situation dans le nord de la bande de Gaza est particulièrement grave depuis la récente offensive militaire israélienne de type « terre brûlée » qui a dépeuplé de vastes zones et aurait tué près de 2 000 personnes. La partie nord de la bande, en particulier le camp de Jabalia, est à nouveau assiégée par les forces israéliennes depuis le 6 octobre 2024. Les autorités israéliennes ont considérablement réduit la quantité d'aide essentielle autorisée à entrer dans le nord. En octobre 2024, la quantité de fournitures parvenant dans l'ensemble de la bande de Gaza a atteint son point le plus bas depuis l'escalade de la guerre en octobre 2023 : une moyenne quotidienne de 37 camions humanitaires est entrée en octobre 2024, bien en deçà des 500 camions humanitaires qui entraient avant le 7 octobre 2023. 

" Depuis plus d'un an, notre personnel médical à Gaza est témoin d'une campagne implacable des forces israéliennes, marquée par une destruction, une dévastation et une déshumanisation massives », a déclaré M. Lockyear. « Des Palestiniens ont été tués chez eux ou dans leur lit d'hôpital. Ils ont été déplacés de force à maintes reprises vers des zones qui ne sont ni sûres ni saines. Les gens ne peuvent même pas trouver les produits de première nécessité comme la nourriture, l'eau potable, les médicaments et le savon au milieu d'un siège et d'un blocus punitifs."

MSF appelle les États, en particulier les plus proches alliés d'Israël, à mettre fin à leur soutien inconditionnel à Israël et à s'acquitter de leur obligation de prévenir le génocide à Gaza. Il y a près d'un an, le 26 janvier, la Cour internationale de justice (CIJ) a ordonné à Israël de prendre « des mesures immédiates et efficaces pour permettre la fourniture de services de base urgents et d’assistance humanitaire afin de répondre aux conditions de vie dramatiques auxquelles sont confrontés les Palestiniens dans la bande de Gaza. » Israël n'a pris aucune mesure significative pour se conformer à la décision de justice. Au contraire, les autorités israéliennes continuent d'empêcher MSF et d'autres organisations humanitaires de fournir une assistance vitale aux personnes prises au piège du siège et des bombardements. ​ 

Les États doivent user de leur influence pour alléger les souffrances de la population et permettre une augmentation massive de l'aide humanitaire dans la bande de Gaza. En tant que puissance occupante, les autorités israéliennes ont la responsabilité de garantir l'acheminement rapide, sans entrave et en toute sécurité de l'aide humanitaire à un niveau suffisant pour répondre aux besoins de la population. Au lieu de cela, le blocus israélien et l'obstruction continue de l'aide ont rendu presque impossible l'accès des habitants de Gaza aux biens essentiels, notamment au carburant, à la nourriture, à l'eau et aux médicaments. Dans le même temps, Israël a décidé d'interdire l'Office de secours et de travaux des Nations unies pour les réfugiés de Palestine dans le Proche-Orient (UNRWA), principal fournisseur d'aide, de soins de santé et d'autres services vitaux pour les Palestiniens. 

MSF réitère son appel à un cessez-le-feu immédiat et durable. La destruction totale de la vie des Palestiniens à Gaza doit cesser. MSF demande également un accès immédiat et sûr au nord de Gaza pour permettre l'acheminement de l'aide humanitaire et des fournitures médicales aux hôpitaux. Alors que MSF continue de fournir des soins vitaux dans le centre et le sud de Gaza, nous appelons Israël à mettre fin à son siège sur le territoire et à ouvrir les frontières terrestres vitales, y compris le point de passage de Rafah, pour permettre une augmentation massive de l'aide humanitaire et médicale. 

Le rapport de MSF souligne que, même si l'offensive militaire israélienne sur Gaza prenait fin aujourd'hui, ses impacts à long terme seraient sans précédent, compte tenu de l'ampleur des destructions et des défis extraordinaires liés à la fourniture de soins de santé dans toute la bande de Gaza. Un nombre stupéfiant de blessés de guerre sont exposés à des risques d'infection, d'amputation et de handicaps permanents, et beaucoup d'entre eux auront besoin de plusieurs années de soins de réadaptation. L'accumulation des traumatismes physiques et mentaux causés par la violence extrême, la perte de membres de la famille et de foyers, les déplacements forcés répétés et les conditions de vie inhumaines marqueront des générations. ​ ​ 

Lire notre rapport (ENG):

MSF_REPORT_Gaza_Life_in_a_death_trap.pdf

PDF - 6.2 Mb

Quentin Barrea

Press & Media FR, Médecins Sans Frontières

 

 

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