Afghanistan: MSF demande une enquête indépendante suite aux frappes aériennes meurtrières sur l’hôpital de Kunduz

Bonjour,

Vous trouverez ci-dessous un nouveau communiqué suite à l'attaque perpétrée sur l'hôpital de MSF de Kunduz en Afghanistan ainsi que le témoignage d'un membre du personnel sur place. Pour rappel, des photos sont disponibles dans notre envoi précédent.

Pour info, je serai absent tout le mois d'octobre. Vous pouvez joindre mes collègues Delphine Van Durme ou Christof Godderis au 0475/406076.

Cordialement,

Raphaël Piret

Kaboul/Bruxelles, 3 octobre 2015. L'organisation médicale internationale Médecins Sans Frontières (MSF) condamne dans les termes les plus forts l’abominable bombardement aérien de son hôpital à Kunduz, en Afghanistan. Douze membres du personnel et au moins sept patients, dont trois enfants, ont été tués; 37 personnes ont été blessées, dont 19 membres du personnel. Cette attaque constitue une violation grave du droit international humanitaire.

Toutes les indications pointent actuellement que le bombardement a été mené par les forces internationales de la coalition. MSF demande que la coalition rende des comptes complets au sujet de ses activités de bombardements aériens sur Kunduz le samedi matin. MSF demande également qu'une enquête indépendante soit menée afin que les responsabilités de cette attaque soient clairement établies.

« Cette attaque est odieuse et constitue une grave violation du droit international humanitaire», a déclaré Meinie Nicolai, présidente de MSF. « Nous exigeons des forces de la coalition la transparence la plus totale. Nous n'accepterons pas que les dizaines de victimes de ce bombardement soient simplement considérées des «dommages collatéraux».

De 02h08 jusqu'à 03h15, heure locale, l'hôpital de traumatologie de MSF à Kunduz a été frappé par une série de bombardements aériens à environ 15 minutes d'intervalle. Le bâtiment central de l'hôpital, abritant l'unité de soins intensifs, les salles d'urgence, et la physiothérapie, a été frappé à plusieurs reprises de façon très précise au cours de chaque incursion aérienne, tandis que les bâtiments environnants ont été laissés quasi intactes.

« Les bombes ont frappé, puis nous avons entendu les avions nous survoler », a déclaré Heman Nagarathnam, chef des programmes de MSF dans le nord de l'Afghanistan. « Il y a eu une pause, puis une deuxièmeme fois des bombes ont frappé. C’est arrivé encore et encore. Lorsque je suis parvenu à sortir du bureau, le bâtiment principal de l'hôpital était en proie aux flammes. Les gens qui le pouvaient sont rapidement allés dans les deux bunkers de l'immeuble pour être en sécurité. Mais les patients qui ne pouvaient pas s’échapper sont morts brûlés alors qu'ils étaient étendus dans leurs lits ».

Le bombardement a eu lieu alors que MSF avait fourni les coordonnées GPS de l'hôpital de traumatologie à la Coalition et aux responsables militaires et civils afghans, y compris très récemment le mardi 29 septembre, pour éviter justement que l'hôpital ne soit frappé. Conformément à la pratique de routine pour MSF dans les zones de conflit, MSF avait communiqué l'emplacement exact de l'hôpital à toutes les parties au conflit.

Dans la foulée de l'attaque, l'équipe de MSF a désespérément essayé de sauver la vie de ses collègues et des patients blessés en mettant en place une salle d'opération de fortune dans une chambre en bon état. Certains des patients plus gravement blessés ont été transférés vers un hôpital, à Puli Khumri, à deux heures de route.

« En plus d'entraîner la mort de nos collègues et des patients, cette attaque a coupé l'accès aux soins en traumatologien d'urgence pour la population de Kunduz à un moment où ces services sont le plus nécessaires", a déclaré Meinie Nicolai. « Une fois de plus, nous appelons toutes les parties au conflit à respecter les civils, les structures de santé, et le personnel médical, selon le droit international humanitaire. »

Depuis que les combats ont éclaté lundi, MSF avait soigné 394 blessés. Au moment de l'attaque aérienne, il y avait 105 patients et leurs aides-soignants à l'hôpital, aux côtés de plus de 80 membres du personnel international et national MSF. MSF exprime ses sincères condoléances aux familles et amis des membres de son personnel ainsi qu’aux patients qui ont tragiquement perdu la vie dans cette attaque.

L'hôpital de MSF est la seule structure du genre dans la région nord-est de l'Afghanistan. Pendantquatre ans, il a fourni gratuitement des services d'orthopédie et de traumatologie de haut niveau afin desauver des vies. En 2014, plus de 22.000 patients ont reçu des soins à l'hôpital et plus de 5900 interventions chirurgicales ont été effectuées. MSF traite tous les malades sur la base de leurs besoins médicaux et ne fait aucune distinction fondée sur l'appartenance ethnique, politique, ou les croyances religieuses d'un patient.

MSF est une organisation médicale internationale qui a d'abord travaillé en Afghanistan en 1980. MSF a ouvert le Centre de traumatologie de Kunduz en août 2011 pour fournir des soins médicaux et chirurgicaux de haute qualité gratuitement aux victimes de traumatismes tels que les accidents de la circulation, ainsi qu’aux victimes des conflits ayant des blessures causées par attentats à la bombe ou des coups de feu. En Afghanistan, MSF appuie le Ministère de la santé publique à l'hôpital Ahmed Shah Baba dans l'est de Kaboul, à la maternité de Dasht-e-Barchi dans l'ouest de Kaboul et à hôpitalde Boost à Lashkar Gah, dans la province de Helmand. A Khost, dans l'est du pays, MSF gère aussiune maternité. MSF repose uniquement sur le financement privé pour son travail en Afghanistan et n’accepte d'argent d'aucun gouvernement.

 

“I have no words to express this. It is unspeakable.”

MSF nurse Lajos Zoltan Jecs was in Kunduz trauma hospital when the facility was struck by a series of aerial bombing raids in the early hours of Saturday morning. He describes his experience.

“It was absolutely terrifying.

I was sleeping in our safe room in the hospital. At around 2am I was woken up by the sound of a big explosion nearby. At first I didn't know what was going on. Over the past week we'd heard bombings and explosions before, but always further away. This one was different - close and loud.

At first there was confusion, and dust settling. As we were trying to work out what was happening, there was more bombing.

After 20 or 30 minutes, I heard someone calling my name. It was one of the Emergency Room nurses. He staggered in with massive trauma to his arm. He was covered in blood, with wounds all over his body.

At that point my brain just couldn't understand what was happening. For a second I was just stood still, shocked.

He was calling for help. In the safe room, we have a limited supply of basic medical essentials, but there was no morphine to stop his pain. We did what we could.

I don't know exactly how long, but it was maybe half an hour afterwards that they stopped bombing. I went out with the project coordinator to see what had happened.

What we saw was the hospital destroyed, burning. I don’t know what I felt – just shock again.

We went to look for survivors. A few had already made it to one of the safe rooms. One by one, people started appearing, wounded, including some of our colleagues and caretakers of patients.

We tried to take a look into one of the burning buildings. I cannot describe what was inside. There are no words for how terrible it was. In the Intensive Care Unit six patients were burning in their beds.

We looked for some staff that were supposed to be in the operating theatre. It was awful. A patient there on the operating table, dead, in the middle of the destruction. We couldn't find our staff. Thankfully we later found that they had run out from the operating theatre and had found a safe place.

Just nearby, we had a look in the inpatient department. Luckily untouched by the bombing. We quickly checked that everyone was OK. And in a safe bunker next door, also everyone inside was OK.

And then back to the office. Full - patients, wounded, crying out, everywhere.

It was crazy. We had to organise a mass casualty plan in the office, seeing which doctors were alive and available to help. We did an urgent surgery for one of our doctors. Unfortunately he died there on the office table. We did our best, but it wasn't enough.

The whole situation was very hard. We saw our colleagues dying. Our pharmacist - I was just talking to him last night and planning the stocks, and then he died there in our office.

The first moments were just chaos. Enough staff had survived, so we could help all the wounded with treatable wounds. But there were too many that we couldn't help. Somehow, everything was very clear. We just treated the people that needed treatment, and didn't make decisions - how could we make decisions in that sort of fear and chaos?

Some of my colleagues were in too much shock, crying and crying. I tried to encourage some of the staff to help, to give them something to concentrate on, to take their minds off the horror. But some were just too shocked to do anything. Seeing adult men, your friends, crying uncontrollably - that is not easy.

I have been working here since May, and I have seen a lot of heavy medical situations. But it is a totally different story when they are your colleagues, your friends.

These are people who had been working hard for months, non-stop for the past week. They had not gone home, they had not seen their families, they had just been working in the hospital to help people... and now they are dead. These people are friends, close friends. I have no words to express this. It is unspeakable.

The hospital, it has been my workplace and home for several months. Yes, it is just a building. But it is so much more than that. It is healthcare for Kunduz. Now it is gone.

What is in my heart since this morning is that this is completely unacceptable. How can this happen? What is the benefit of this? Destroying a hospital and so many lives, for nothing. I cannot find words for this.”

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À propos de MSF/AZG

Médecins Sans Frontières est une organisation médicale humanitaire d’urgence, active dans plus de 70 pays du monde.